Confinés mais ensemble - Chronique d’une période tourmentée #23

Jour 41

Samedi 25 Avril

C’est le mal de dos qui me tire du sommeil.
Plusieurs nuits que je dors mal...
La faute à nos vieux oreillers peut être, il faudra que l’on pense à en changer...
Ou peut être au matelas...
Je ne saurais dire...
Je m’étire et je me dis que ça passera.

Après le café je me met en cuisine.
J’y passerai finalement toute la matinée, en pyjama.
En ressortiront 6 flans coco, une quinzaine de bagels et des financiers pour le goûter.
(la recette du flan coco est en story à la une sur instagram si vous la cherchez)


On m’a beaucoup demandé la recette des bagels.
J’ai toujours un peu de mal à partager une recette issue d’un livre à vrai dire.
J’estime que l’auteur(e) s’est donné du mal et que ça ne serait pas correct.
Alors ma recette à moi elle vient du livre Bagels comme à New York, qui trônait sur mes étagères depuis plus de 10 ans.
Mais vous en trouverez une ici qui ne m’a pas l’air mal du tout.

Beaucoup m’ont demandé comment je les conservais pour la semaine: c’est tout simple!
Coupés en deux à l’horizontale, au congélateur!
Vous les sortez à la demande et vous les passez direct au grille pain!
Et voilà!

Nous sommes passés à table à l’heure espagnole comme on dit chez moi...
C’est un peu le cas tous les jours depuis le début du confinement.
En fait on se rend compte que notre rythme « naturel » est décallé d’une heure et demi environ par rapport aux rythme « conventionnel » (manger à midi etc...).

J’ai passé tout le temps de la sieste des garcons sur le canapé à regarder distraitement la télé.
Mon cerveau était en permanente ébullition et j’égrainai mentalement la liste des choses qu’il aurait fallut que je fasse, et celles aussi que j’aurais aimé faire (oui il y a une différence subtile...ou pas!).
Mais mon corps refusait de bouger...
Je déteste ça.
Je suis plutôt « hyperactive » (vous le savez) et le fait d’être forcée de rester « à l’arrêt » m’agace prodigieusement.
J’en viens même à m’énerver contre moi de ne pas me remuer.
Dur dur de lâcher prise...
J’en ai eu encore la preuve aujourd’hui.

Pendant que nous regardions la télé, Mathieu zonait sur le bon coin (oui oui, chacun ses passes temps) et il est tombé sur l’annonce que je redoutais tant.
Mes oncles ont décidé de mettre en vente la maison de mon enfance, de notre enfance.
Je le savais bien sur, je savais les expertises, les agences immobilières,...
Mais tomber sur l’annonce ça rendait tout ça bien trop réel...
J’ai refusé de la regarder, refusé d’en parler...
Mon coeur s’est brisé en mille morceaux et je n’ai pu retenir mes larmes.
Les images ont afflué me faisant pleurer de plus belle: la lumière à travers les volets, les rideaux de notre chambre, les bruits de la cuisine, papy au bout de la table, ma soeur et moi en pyjama, maman et nous dans le même lit, le rire de mamie,...
De vous l’écrire encore ici, je sens la boule que je connais bien se former dans ma gorge.
Je ne peux me résoudre à tout ca mais je n’ai pas de solution.
Je bloque à nouveau l’information pour ne pas trop souffrir...
Je verrais plus tard...
Même si au fond je transporte cette immense tristesse avec moi tous les jours depuis que je sais...

Les enfants se lèvent et leur tourbillon m’emporte.
On goute et on va jouer dehors.

Mathieu fabrique une installation de fortune pour notre Bee Home (bientot nous serons « éleveurs d’abeilles » dixit Marius) et elle est enfin en place.
Les garçons s’amusent et font du bruit.


Et moi je m’installe, dans le dernier rayon de soleil de la journée et je déballe la gentille attention envoyée par Adeline (Atelier Hosta): un de ses kits pour fabriquer une couronne de fleurs séchées.
Tout à coup, je suis dans ma bulle.
Je n’entends plus les ballet de voitures en contre bas, ni les chamailleries des garçons.
J’attache les fleurs autour du cercle en fer de façon hypnotique.
Je pourrais faire ça pendant des heures je crois.
Ma petite couronne est terminée, je vais lui trouver une place sur l’un de nos murs.
(Et puis mon petit doigt me dit qu’il y aura un petit concours pour gagner un kit cette semaine sur IG...)

Les enfants filent au bain, et moi je pose des mots ici.
Notre journée n’a pas été folle de rebondissement, mais je tiens à ce rendez vous quotidien ici.

J’écris jusqu’à l’heure des applaudissements.
Je salue ceux qui me sont devenus familier et que j’ai l’impression de connaître un peu...


Jour 42

Dimanche 26 Avril

C’est dimanche et, à part poster mon dernier DIY sur le blog, je décide de ne rien faire d’autre que me consacrer aux miens.
Je suis du style à toujours avoir une broderie ou une crochetterie dans les mains pour « occuper » mes doigts.
Mais aujourd’hui, ce sera pour eux.


Marius me demande, depuis le début du confinement, une tente de camping et des sacs de couchage pour ses playmobils.
Il est tombé sur le livre « En avant l’aventure! » de Kate Bruning (Éditions Eyrolles) que j’ai depuis qu’il est né dans ma bibliothèque.
Je m’attendais à ce qu’il me demande la caravane ou le marchand de glaces (parce qu’il faut avouer qu’ils sont canons mais que c’est beaucoup de travail) mais il à porté son dévolu sur une petite tente et des sacs de couchages.


Parenthèse: le petit monde au crochet que nous propose Kate Bruning dans ses ouvrages est juste magnifique et très aboutit. Elle nous proposer de crocheter le moindre petit détail (même les buches pour le feu de camp) et, même si l’on ne veut pas tout réaliser, il y en a pour tous les goûts.
Je vous invite à aller découvrir son univers coloré et onirique sur son compte instagram. En ce moment elle crochète des fleurs et c’est magnifique.

Marius avait donc choisi simplement 2 sacs de couchage et une tente...
Après le petit déjeuner, je lui donne un petit panier et il va faire son marché de couleurs dans mon stock de pelotes en coton.
Il choisit beaucoup de bleu, mais aussi du moutarde, du rose et du rouille.
Il a bon goût, que voulez vous.

On s’installent tous sur le balcon: les enfants jouent, Mathieu bricole et je crochète.
On met toujours de la musique.
On adore ça.
On aime mieux ca que le silence relatif de la rue.

Oui parce qu’ici, à Marseille, depuis que le soleil à refait surface, on voit du monde dans les rues, ça circule, ca discute, ça crie parfois.
Beaucoup trop de monde à mon goût...
Beaucoup de voitures aussi, de motos, de trottinettes, de vélos...

On met la musique donc et on laisse se dérouler le flow aléatoire de nos goûts mélangés.

Quand tout à coup, Mathieu se penche vers le sol et il me dit « Y en a une qui est née ou quoi? ».
Une? Une Quoi? Une Quoi?
Les enfants accourent, je m’approche.
Il a raison, elle est bien là notre première abeille maçonne.
Un peu étourdie encore, elle a l’air tellement fragile.
On s’émerveille devant cette vie qui s’éveille.
Et je suis à la fois chamboulée et étonnée de l’être.


Parce que bon, faut que je vous avoue un truc, moi les insectes, c’est pas ma grande passion.
J’aime pas vraiment leur compagnie.
Mais cette abeille là, elle est si jolie!
Et puis c’est « la notre » (même si tout est relatif hein on est d’accord, on ne la possède pas vraiment, on lui met un endroit à disposition pour vivre sa vie d’abeille).
C’est beaucoup d’émotions donc.
Les enfants sont fascinés, et comme je sais qu’elle est inoffensive, je n’ai aucun mal à les laisser s’approcher de très près pour l’observer.
Je leur répète 150 fois de la laisser tranquille et de ne pas trop l’embêter.
Elle se pose sur Martin quelques instants.
Elle ne vole pas encore beaucoup, elle vient de naître.
Elle reste donc beaucoup au sol et je suis terrorisée à l’idée que les garçons lui marche dessus.
Je créé un périmètre de sécurité afin d’éviter tout accident malheureux.
Au moment de rentrer pour le repas, elle prend son envol.
On espère qu’elle reviendra.


Pendant la sieste des garçons, je m’active pour fabriquer les sacs de couchages et la tente promise.
Et puis, ma tête commence à mouliner et j’ai une idée: il me reste de la feutrine verte...je pourrais leur fabriquer un terrain de camping en plus du reste...!


Et me voila partie: je sors la machine à coudre.
Les enfants se lèvent, j’explique à Marius, il est emballé par l’idée.
On choisit ensemble les tissus pour le lac, les parterres de fleurs, l’aire de jeu...
Je couds maladroitement sur la feutrine pendant que Mathieu construit la structure de la tente avec des pailles et des cure dents.

Quelques longues minutes plus tard, on peut donc installer notre camping.
Je fouille les bacs avec Marius à la recherche d’éléments de jeu pour créer notre petit monde.
Des pommes, un panier, un feu de camps,


Et l’enfance au visage, à nouveau.
Dans la chambre de mon cousin, des après midi entières.
La roulotte de cirque, le campement que nous mettions des heures à installer.
Nous étions si heureux, si concentrés.
On ne jouait que très peu à faire semblant finalement, on passait nos après midi à s’inventer un univers.


Jour 43

Lundi 27 Avril

Ma tête est lourde ce matin.
Sortir du lit s’avère compliqué.
J’émerge difficilement alors que tout le monde se lève tranquillement.
Les rôles s’inversent parfois.
Surtout ces temps ci.

Martin est de mauvaise humeur et je suis victime d’un jet de petite voiture en fer dans le dos:
1. Cet enfant a beaucoup trop de force.
2. Je ne m’y attendais pas du tout.
3. Ça fait un mal de chien.

Je laisse Mathieu prendre (déjà) le relai parce que je n’arrive pas à retenir mes larmes.
Ça fait mal, au dos certes mais au coeur aussi.
C’est le déclencheur qui ouvre et libère les vannes.
Je n’arrive plus à m’arrêter.

Y a des matins comme ça.


Un câlin, quelques bisous, des mots pour apaiser tout le monde et la journée peut commencer.
Les réservoirs sont rechargés, on peut démarrer.

Et c’est peu de le dire, aujourd’hui c’est la reprise de l’ « école à la maison ».
Même si la maîtresse de Marius n’est pas très assidue dans l’envoie de petites activités, j’essaie de ne pas lui faire perdre l’habitude.
Mais je me demande si c’est bien utile...
On ne fait pas grand chose hein, on écrit le prénom, on fait un dessin, on reconnaît les chiffres,...


D’ailleurs aujourd’hui, nous avons reçu un mail de la maîtresse: Marius retournera t il à l’école ou non le 25 mai? Il faut se prononcer.
La réponse est déjà prête: dans les conditions sanitaires actuelles, il ne reviendra pas à l’école avant le mois de septembre. Cordialement.
Et j’aimerai que tout le monde ait la même possibilité de choisir que moi, mais je sais que ce n’est pas le cas.
Je ne veux pas polémiquer ici.
J’ai travaillé plus de 15 ans auprès des enfants, en maternelle et élémentaire, et je ne vois pas très bien comment cette reprise peut être mise en place sans que cela ne soit risqué.
Pour les enseignants en premier, les personnels de l’école, les enfants et les familles.
Expliquez moi comment garantir ne serai ce que le respect des gestes barrières avec des enfants. Même en tout petit groupe.
Même à 5.
C’est inconcevable pour moi.
Il n’ira donc pas, parce que j’ai la chance d’avoir le choix.

Cet après midi, Marius ne fera pas la sieste.
Hier il n’a trouvé le sommeil que près de minuit.
Il ne se dépense pas assez, c’est un fait.
Il reste près de moi avec ses jeux de construction et je dois tenter de me concentrer.

C’est sans compter sur le voisin qui vient de décider de faire des trous dans ses murs pendant plus d’une heure et donc le réveil prématuré de Martin qui ne veut plus du tout dormir.


Je ne suis pas habituée, c’est vrai.
Je l’ai souvent dit mais nous avons beaucoup de chance ici avec le sommeil de nos garçons.
De longues siestes, même encore pour Marius, des endormissements plutôt faciles...
Alors forcément, j’ai l’habitude d’avoir au moins 1heure ou 2 de calme en début d’après midi.
Et ca ne sera pas pour aujourd’hui donc!

Alors, entre les sirènes des petits camions de pompier, les cris des enfants, leurs rires aussi et leurs chamailleries, les cubes qui tombe et la perceuse du voisin, j’essaie de me concentrer pour avancer, non sans mal...

Mathieu sort enfin du bureau vers 18h.
Je suis à cran et agressive, je le sais.
J’ai été dans le bruit non stop depuis 8h ce matin.
j’ai réglé les conflits, j’ai crié aussi, j’ai accueilli du mieux que je pouvais les frustrations et les colères de mes gars, et j’ai du gérer les miennes aussi...
On doit descendre en bas de l’immeuble pour faire des courses.
Je demande à y aller, j’ai besoin de sortir, meme masquée.

J’enfile mes chaussures et mon masque (note: il faut que je nous en couse d’autres, le mien commence à être un peu fatigué à force de le laver).
L’ascenseur, les portes, l’autre ascenseur, la porte encore et la rue.
C’est l’angoisse à chaque coup.
Mon cerveau se met en mode « survivor »: ne rien toucher, ne pas se toucher le visage, j’ai touché merde, faut que je m’en souvienne, mince j’ai touché mon portable, faudra que je le désinfecte en rentrant, j’ai l’œil qui gratte, te gratte pas putain te gratte pas,...

C’est vraiment un enfer d’avoir tout ça en tête en même temps.

Je regarde autour de moi: nous sommes une minorité à porter des masques.
Et je récolte des regards étonnés, agacés et blasés de ceux qui n’en ont pas.
J’ai l’impression d’être l’anormale, la pestiférée du supermarché.
Alors que ça ne devrait pas être la cas pas vrai?
Je me protège et je protège les autres du mieux que je peux.
Mais on dirait que ce n’est pas la priorité de certains.
J’évite cependant de me laisser emporter par le jugement.
Ce n’est vraiment pas le moment.

En ce moment, chacun fait comme il veut et peut surtout.
Et les donneurs de leçons gratuites ne font pas avancer le débat en général.
Ils brusquent, agacent et provoque le rejet.
En tout cas c’est l’effet que ça a sur moi.

Quand on « expose » une partie de sa vie comme moi (ici ou là) évidemment il faut s’attendre à des commentaires négatifs mais je suis toujours perplexe face à cette fâcheuse habitude qu’ont certains...
Ca me pose toujours question parce que je ne saurais pas faire ça.
Je ne saurais pas aller donner mon avis quand on ne me le demande pas.
Surtout pour y glisser des jugements.
Mon cerveau n’est pas formaté comme ça...
ça ne rentre pas dans mon système...

Mais en allant faire des courses, j’ai trouvé des pivoines.
Je me fais ce plaisir.
5 tiges pour soutenir des producteurs locaux qui auraient du jeter leur production de fleurs s’ils n’avaient pas trouvé de partenariats avec les épiceries et supermarchés de quartier.

Des pivoines, l’une de mes fleurs préférées.
Quand je sors du magasin elle sont en boutons, je les aime beaucoup comme ça aussi.

Je leur trouve une place, je coupe leurs tiges à la bonne taille et en biais.
Je les dépose au centre de la table.
Et le temps de me retourner, l’une d’elle m’offre le spectacle de s’épanouir complètement.

Que c’est beau...
Et que la nature me manque...


Commentaires

Les Jolies étiquettes

Articles les plus consultés